Julia et Nastasia et leur passion pour les plantes
Nous vous emmenons dans un univers plus terrestre aux côtés de Julia et de sa sœur Nastasia, toutes deux devenues Herboristes.
Tous les vendredis, en venant récupérer vos tisanes BIO ou autres produits cosmétiques découvrez comment vous permettez la renaissance d’un métier ancestral tombé dans l’oubli...
Bonjour Julia, alors explique-nous, qu'est-ce que c'est le métier d'herboriste ?
L'Herboriste fait partie des vieux métiers, hélas oubliés... Mais aujourd'hui, un regain de la profession est en train de naître: les gens sont devenus soucieux de comment se soigner au naturel. À l'époque, l'herboriste était celui qui avait la connaissance des plantes et savait les transformer. Il n'était pas forcément cueilleur, et se fournissait chez les paysans cultivateurs de médicinales, ou cueillait en sauvage. L'Herboriste avait une reconnaissance Étatique, et pouvait exercer librement, grâce à sa formation et ses connaissances acquises par 3 années d'études.
Malheureusement, en 1941, sous le régime de Vichy, et sous la pression d'Hitler et de l'industrie pharmaceutique grandissante, le Général Pétain abolit le diplôme, et les pharmaciens obtiennent alors l'exclusivité dans le domaine de la santé.
Le métier d'herboriste n'a alors plus de reconnaissance et les herboristeries ferment progressivement. Les gens se désintéressent peu à peu de notre médecine ancestrale, qui devient charlatanesque, discréditée par l'Etat et l'industrie pharmaceutique. C'est l'apogée de la médecine allopathique.
Fort heureusement, depuis 2017, le sénateur du Morbihan, Joël Labbé, remet ce débat au cœur de l'actualité, et mène un combat compliqué pour la réhabilitation du diplôme par l'Etat. Ainsi, les herboristes pourraient enfin exercer de nouveau légalement, et cohabiter avec la médecine allopathique.
Le sujet est en train d'être débattu au Sénat, et nous espérons une fin favorable aux nouveaux herboristes !
On voit que vous êtes sincèrement passionnée par votre métier si unique. Comment vous en êtes arrivées jusque là ?
Ma sœur et moi-même étions sensibilisées très jeune à l'écologie. Nastasia a passé son diplôme d'herboriste à 20 ans, et en parallèle, je m'intéressais déjà à l'aromathérapie et aux médecines douces, dites "alternatives".
Après quelques années de voyage et d'apprentissage autour des plantes, entre le Pérou et la Chine, nous sommes revenues vivre en France en 2013. Nous avons alors commencé à faire les marchés, en tant qu'auto-entrepreneuses. Ma sœur achetait des plantes, préparait ses mélanges et nous vendions ses tisanes en direct sur les marchés locaux. Moi, je m'occupais de la partie transformation, savons et cosmétiques naturels.
Tout de même, on se posait des questions éthiques: d'où viennent les plantes achetées? Sont-elles de belles qualités? Sont-elles locales? Le chemin de la production était tout tracé. On savait que pour être dans une boucle vertueuse, pour avoir une belle qualité et un goût authentique, on devait produire nous même nos plantes. Ainsi, la boucle était bouclée.
En 2017, nous avons commencé à produire nous-même nos plantes, et nous nous sommes installées en tant qu'agricultrices en 2019, sur notre ferme récemment acquise. Une belle aventure en somme !
Cela fait donc 4 ans que vous vous dédiez entièrement à votre métier, qu'est ce qui est difficile pour vous aujourd'hui en tant qu'herboriste ?
La difficulté de notre métier, comme tout métier agricole, c'est le temps qui nous manque! Nous avons choisi un métier passion, qui nous permet de porter des valeurs qui nous tiennent à cœur. Alors on s'investit à fond. De plus, on porte toutes les casquettes: production, transformation, vente, gestion, comptabilité... Dans notre métier, il y a toujours quelque chose à faire. Si on ne sait pas couper, on ne s'arrête jamais! C'est le risque: tomber dans une spirale infernale où on travaille tous les jours, et ne plus arriver à se dégager du temps pour soi. Alors que c'est primordial pour garder un équilibre, et pour être efficace au travail.
Grâce à quoi et à qui arrivez-vous à vivre de votre métier aujourd'hui ?
Si nous vivons enfin de notre métier, je dirais que c'est avant tout grâce à notre persévérance, à cette passion qui nous anime.
Il en aura fallu des années plus ou moins galères pour y arriver. C'est un métier dur, où l'on ne compte pas ses heures, avec une grosse charge mentale. Sans persévérance, on aurait abandonné en chemin.
Mais cette réussite, on la doit aussi à nos clients, qui sont au rendez-vous! Sans eux, on n'existerait pas. Il y a une demande de plus en plus forte concernant les plantes aromatiques et médicinales. Les gens sont lassés des médicaments allopathiques, et commencent à prendre conscience qu'on peut se soigner autrement, à travers de la prévention. Et qu'en plus, ça fait du bien à leurs corps, et à la planète! Cette "vague verte" est une bénédiction pour nous: les gens sont très réceptifs et curieux de notre métier. Ils souhaitent se réapproprier nos savoir ancestraux, et nous sommes là pour les aider dans cette démarche. C'est un très bel échange.
On comprend que cet élan écologique est totalement bénéfique pour vous.
Malheureusement, il y a un an, vous avez dû vous heurter, comme beaucoup, à la crise sanitaire mondiale.
Qu'est ce qui a changé pour vous, dans votre métier et votre vie de tous les jours ?
Cette crise sanitaire inédite a été très compliquée à gérer au début.
Nos circuits commerciaux étaient basés exclusivement sur les marchés hebdomadaires mais en Mars et Avril, le gouvernement a suspendu les marchés, pendant que les grandes surfaces restaient ouvertes. Ça a été un coup dur pour les agriculteurs en vente directe. On a eu une énorme chute de notre chiffre d'affaires, et on ne s'est pas senti soutenu par le gouvernement, ne pouvant plus vendre notre production... On a donc dû faire preuve de créativité et de réactivité!
C'est ainsi qu'on a commencé à diversifier nos filières commerciales: on s'est rendu compte qu'avoir tous ses œufs dans le même panier était dangereux. Petit à petit, on a créé avec d'autres producteurs des distributions via cagette.net, les réseaux sociaux, etc. La chambre de l'agriculture a créé à ce moment-là une nouvelle plateforme de distribution de produits locaux, "Nos producteurs chez vous", car le Drive Fermier était saturé. Cette réactivité à fait qu'on a réussi à trouver d'autres débouchés commerciaux.
Avec du recul, c'est un mal pour un bien, dans le sens où cela nous a permis de nous diversifier. Ainsi, nous sommes mieux préparés à de prochaines crises, sait-on jamais...
Ici, au Drive Fermier Gironde, on est reconnaissant de travailler avec vous chaque semaine. Pourquoi avoir privilégié cet exemple de circuit court comme moyen de distribution ?
Nous avons connu le Drive Fermier pendant le 1er confinement, en Mars.
C'est une belle initiative de la Chambre, qui mérite d'être soutenue. Cela donne la possibilité aux citadins d'avoir accès à des produits du terroir, et de qualités. Cela permet de soutenir les producteurs, et de sensibiliser les consommateurs.
Je partage les valeurs que le Drive souhaite porter, c'est pour ça qu'on a décidé d'en faire partie.
De plus, ne faisant pas ou peu de marché sur bordeaux par manque de temps, alors qu'on a de la demande, cela permet aux bordelais d'avoir accès à nos produits !
Qu'est ce qu'il vous manque aujourd'hui pour être la plus sereine possible dans votre travail ?
Ce qui nous manque aujourd'hui, pour être plus sereine au travail, c'est une reconnaissance étatique et une légitimité dans notre métier! Comme dit plus haut, le métier d'herboriste a été aboli sous Vichy. L'industrie pharmaceutique a obtenu le monopole de la santé, et les herboristes se retrouvent dans l'illégalité d'exercer.
C'est très angoissant au quotidien de toujours devoir faire attention à ce qu'on dit, aux conseils qu'on donnent, à ce qu'on écrit, par peur d'être sanctionné, puisque nous ne sommes pas médecins. Malgré nos connaissances, nous n'avons pas le droit de dire à notre client que telle ou telle plante est digestive, calmante, tonique, etc. Pas d'allégations thérapeuthiques. Cela nous oblige à toujours trouver des subterfuges, des noms originaux qui sous-entendent la fonction d'une tisane, pour que le client soit autonome au maximum. Nous souhaiterions que l'Etat réhabilite le métier d'herboriste, ainsi, nous serions en paix.
Pour finir, quelle tisane nous conseilles-tu en ces temps froids ?
La tisane du moment, c'est la Résistance! Une tisane qui va nous accompagner tout au long de l'hiver, en renforçant notre système immunitaire.
Une tisane idéale contre les affections hivernales.
Sa composition:
Hysope, Fleurs de sureau, Cynorrhodon, Reine-des-prés, Echinacea, Sarriette, Thym, Ortie.
Posologie: 1 cuillère à café par tasse, ou une belle cuillère à soupe pour un litre. Verser l'eau frémissante sur vos plantes, et laisser infuser 15 minutes. A boire sans modération!